Ça ne peut plus durer. Ça va mal finir. Il faut changer de logiciel. Renverser la table. Les slogans refleurissent ces derniers temps, les coups de mentons, les poings fermés et la harangue aux lèvres. Les métaphores du grand bouleversement, du renversement salvateur, sont ressassées, recrachées comme une Valda trop suçotée.
Ces sentences n’ont que rarement trouvé un réel accomplissement. C’est en cela que le livre de Bertrand Guillot est opportun. Dans la nuit du 4 août 1789, les privilèges de l’ancien monde féodal sautent. Pas seulement ceux, iniques, de la noblesse et du haut-clergé mais également les exemptions fiscales provinciales. La France moderne est née ce jour-là. La vraie Bastille est tombée cette nuit-là.
Bertrand Guillot fait vivre ces quelques heures où une fièvre inarrêtable (sur)prend la nouvelle Assemblée nationale. Alors que les États généraux piétinaient et s’égaraient en des arguties sans fins, à faire passer une après-midi télévisuelle devant la chaine parlementaire pour un concert punk. Bertrand Guillot retrace les grandes étapes et souligne que l’abolition des privilèges est un accomplissement qui n’avait rien d’inévitable.
Trempant sa plume dans une encre vive, Guillot est un intraitable portraitiste, du plus haut, Louis XVI homme aimable, totalement dépassé qui ne souhaite rien d’autre qu’une sérénité inatteignable au plus humble, représentant crotté du tiers-état qui participera au vacillement puis l’effondrement d’un système séculaire.
Guillot n’esquive en rien les résonnances avec notre époque. Ni l’ambiguïté du mot révolution qui signifie aussi bien avènement des Grands Soirs qu’une rotation totale pour finir au même point. Car on peine à éprouver pleinement cette abolition non ? Que penserait donc nos lointains ancêtres, poudrés, à l’hygiène aléatoire en contemplant notre monde ? Les privilèges sont plus insidieux, non-inscrits dans la loi mais toujours là, immuables, jusqu’à la prochaine révolution. Au sens révolté du terme...
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