jeudi 2 juillet 2020


Première lecture Prix du meilleur Polar Points 2021

J'ai l'immense plaisir d'avoir été sélectionné comme juré pour désigner le meilleur polar des éditions Points. Et j'ai commencé par du costaud.


Ils ont été sauvagement assassinés à coups de pied dans la rue : leur seule faute, être étrangers. Visage masqué, leur agresseur s'est planté devant les caméras de surveillance pour signer son acte d'un salut nazi. L'inspecteur Zigic et sa coéquipière, le sergent Ferreira, reçoivent alors une consigne claire : ne surtout pas ébruiter la piste raciste auprès des médias, car la ville de Peterborough est déjà au bord de l'implosion.


Je sais que comparaison n’est pas raison et que le compas est rarement dans notre œil mais plus sûrement dans celui du voisin. Néanmoins, quand je regarde nos presque riverains anglais, j’ai tendance à me fourrer le compas dans l’œil, culturellement parlant. Alors, oui, le fameux art de vivre à la française, on y mange mieux, mais pour le reste... Les Rolling Stones quand nous avions Richard Anthony, Nick Hornby quand nous lisons David Foenkinos... Evidemment, je force le trait, à peu près aussi subtilement qu’une candidature à la mandature suprême de Jean Marie Bigard.

Optons pour plus consensuel : Les séries télé. Si quelqu’un me dit que la production hexagonale surpasse celle du Royaume-Uni, je l’assomme à coup de pelle. Pour un Bureau des Légendes, cinq ou six séries britanniques viennent spontanément aux lèvres, une dizaine si on se creuse un peu.

Les série anglaises ont ce quelque chose unique, qui nous happe. Quand on lit Haine pour haine de Eva Dolan, on a la sensation tenace de lire une série anglaise. De celle qui travaille la pâte humaine, qui ne se contente pas d’une esquisse, d’avatars réduit à leur fonction, vite évacués pour laisser place à des rebondissements pétaradants. Haine pour haine possède cet amour des personnages, loin de toutes caricatures, immédiatement accessibles, sans sacrifier aucunement à la tension qui imprègne chaque ligne, chaque paragraphe.

Un polar sur les crimes de haine, c’est la fenêtre ouverte sur les raccourcis, les refrains moralisateurs ou le cynisme en bandoulière. Eva Dolan slalome entre ces écueils, pour tenir sa ligne, tenue et fragile, elle n’en dévie jamais. Sans effets de manches particuliers, un style faussement plat, bien plus travaillé qu’il ne peut sembler, au service de l’intrigue et des protagonistes. Tout pour le livre, rien que pour le livre. Nous, nous la lisons en regardant, presque, une écriture visuelle pour un foutu bon livre.

Merci aux éditions Points, je ne sais pas ce que donnera le reste de la sélection mais ça commence lourd, très lourd...

0 commentaires :

Enregistrer un commentaire