Traduit du croate par Olivier Lannuzel
« les fils sont toujours un malheur »
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Automne 2022. Après la saison touristique, Split se dirige lentement vers l’hibernation d’après-saison. Ines est une jeune femme qui travaille à la réception d’un hôtel. Sa mère, Katja, est femme de ménage et s’occupe de la maison, d’Ines et de son jeune frère.
Zvone est un policier prometteur qui reçoit un appel du travail. Un corps a été retrouvé dans une usine désaffectée à proximité de la ville. Il s’agit du corps d’une jeune fille de 17 ans, Viktorija, fille d’un éminent médecin.
Le meurtre de la jeune fille bouleversera à jamais le destin des trois personnages principaux….
Que sommes-nous prêts à sacrifier pour protéger ceux que nous aimons, et quelles en seront les conséquences inévitables ?
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Jurica Pavicic est l’un des écrivains les plus doués de sa génération. Depuis L’eau rouge, époustouflant polar familial et géopolitique qui écuma tous les prix polardeux disponibles, Jurica s’est recentré sur la sphère familiale avec son drame psychologique impressionnant La femme du deuxième étage.
Son troisième opus est un mélange des deux, si on veut. Un thriller familial certes mais qui dit aussi beaucoup de la Croatie.
Jurica Pavicic fait quand même la nique aux auteurs de thrillers ventrus, qui enquillent jusqu’à plus soif des tueurs en série machiavéliques ourdissant des plans tordus dans des caves mal éclairés. Jurica le sait : le mal est rarement séduisant. Les caves tu y choppent surtout des champignons ou des moisissures.
Contrairement au nanawesque du thriller contemporain, ce roman est crédible. Et tendu. Quelle tension ! Sans tenailles, sans ce don d’ubiquité dont semblent doté les sérial killers récents. On dirait des X-men déviants, capable de sauter d’une maison de campagne à une ruelle en quelques minutes.
On lit sans faillir, non sans frémir, cette plongée en une Croatie secouée par le viol et meurtre sordide d’une jeune femme. De bonne famille. Ça secoue d’autant plus. Nous devinons vite qui est le coupable. Le suspense ne se niche pas là.
Il se loge en ce que nous ne savons pas vraiment ce que nous ferions nous ? Jusqu’où nous irions ?
Habité par deux personnages féminins inoubliables, le dernier livre de Pavicic est un bijou d’orfèvrerie. Une montre de précision dont nous n’entendrons aucun engrenage s’enclenchant alors qu’ils s’imbriquent implacablement, inexorablement, sans que nous puissions en anticiper la marche.
Une mécanique de précision qui n’occulte pas l’humaine tragédie, la fange ordinaire et une Croatie rongée par une corruption endémique. Si aucune leçon ne peut être donnée par notre pays en matière de pratique politique byzantine, on se dit que la Croatie n’est guère mieux lotie et que, in fine, les moins fortunés paieront.
Toujours ?
Imparable roman, jusqu’au dénouement grinçant et inconfortable.
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