mardi 30 janvier 2024

« Vous avez remarqué ? Les questions fondamentales n’ont jamais de réponses. »

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Stella fait des miracles. Au sens propre. Elle guérit malades et paralytiques, comme dans la Bible. Le Vatican est aux anges, pensez donc, une sainte, une vraie, en plein vingt et unième siècle ! Le seul hic, c’est le modus operandi : Stella guérit ceux avec qui elle couche. Et Stella couche beaucoup, c’est même son métier…

Pour Luis Molina, du Savannah News, c’est sûr, cette histoire sent le Pulitzer. Pour le Vatican, ça sentirait plutôt les emmerdements. Une sainte-putain, ça n’est pas très présentable. En revanche, une sainte-martyre dont on pourrait réécrire le passé…

Voilà un travail sur mesure pour les affreux jumeaux Bronski, les meilleurs pour faire de bons martyrs. À condition, bien sûr, de réussir à mettre la main sur l’innocente Stella. C’est grand, l’Amérique.

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Je me demande si la rentrée littéraire d’hiver n’est pas encore plus aberrante que celle d’automne. 

Mais si, celle de fin août et début septembre. Celle qui nous présenta des livres nécessaires, essentiels. 

Bon... Oubliez-les, faut faire place ! Parce que là, on a quoi ? Un mois et demi pour caler les nouveaux livres essentiels et nécessaires, sur ce qui arrivé à mon papa, mon grand papa. Les secrets de famille à lire, par le plus grand nombre si possible. Mais avec pudeur hein ! La famille Delon en plus élégant. 

Les libraires sont crevés et n’ont pas le temps de lire après les Fêtes ? les lectrices se remettent de ces dernières et n’ont pas plus le temps ni l’envie ? Pas grave ! Parce que papa, grand-papa, etc. 

Mais cela n’empêche en rien les pépites de se distinguer dans le tamis. Incardona, le Harry Crews suisse (celle-là est pour moi Joseph et n’est pas volée) nous enchante avec un road-trip acide, furieusement barré, dans une Amérique où Capra se fait enterrer vivant par les frères Cohen, Harry Crews (encore) et quelques autres. 

Stella, de qui, par son corps, la grâce découle (la phrase est moche oui), ne correspond pas au storytelling biblique et miraculeux ? On va réécrire le scénario, avec deux frères psychopathes à la table de montage. 

Joseph Incardona interpelle souvent son lectorat dans son bouquin complètement tapé et totalement maitrisé. Ce quatrième mur récurrent acquiert une sorte de work in progress savoureux et fascinant (ce que n’est en rien mon abus agaçant d’anglicisme). 

Joseph Incardona s’amuse et nous amuse, ce qui n’est pas toujours le cas, cette conjonction, cet amusement collectif, partagé. Il nous happe également.

Ce que nous raconte Stella et l’Amérique, c’est que le corps des femmes ne leur appartient toujours pas pour quelques-uns toujours trop nombreux. 

Stella n’appartient qu’à elle, je ne suis même pas sûr que Joseph puisse réclamer une quelconque tutelle. 

Je ne saurais trop vous conseiller de de dévorer ce roman frénétique, garanti sans « mais qu’est ce qui s’est passé avec mamie ? » ni phrases moches.

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