lundi 7 mars 2022

Il pleurait l’amour donné puis repris, les miracles qui étaient redevenus de simples mots, sa vie qui disparaissait en mille petits insectes de feu [...]
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La Rochelle, mois de juillet. Une femme est retrouvée égorgée chez elle face à son fils de dix ans, qu'un bandeau et un casque audio ont préservé de l'intolérable spectacle. C'est la deuxième en l'espace de trois mois et les flics n'ont pas la moindre piste.

Le commissaire Baccaro va alors faire appel à Victor Caranne, psychologue carcéral et oreille préférée des criminels multirécidivistes de la prison de l'île de Ré. Mais le tueur est une ombre insaisissable qui va bientôt faire basculer la ville dans la psychose.

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En 2020, une bombe nommée Somb produisait son blast sur le polar français. Max Monnehay donnait vie à Victor Caranne. Un homme tourmenté, traumatisé, un carcan de culpabilité recouvert d’épiderme. Caranne est psy à la prison de l’île de Ré qui renferme en son écrin architectural remontant à Vauban parmi les prisonniers les plus violents de France. 

Victor Caranne est beau, de cette beauté du poète maudit dont les plaies psychiques suturent en continu. Il fait de la moto. Il est intelligent. Il a les cheveux un peu trop longs. Bref, il est, à priori, archétypal. Et il l’est. Mais Max Monnehay a le talent de le sublimer. Plutôt que l’enfermer dans une caricature, elle joue de ce clicho-sapiens pour fouailler ses failles et nous le rendre accessible, immédiatement agaçant et touchant. 

Pour tout dire, Max Monnehay me fait penser à Daniel Cole et sa trilogie Wolfe débutée avec Ragdoll (et inversement) ce qui est assurément un foutu compliment sous mes touches. 

Dans ce nouvel opus, Je suis le feu, Caranne pense à panser ses plaies, il n’en a pas le temps. Un tueur rode. Les meurtres soigneusement mis en scène font bascule l’île de Ré dans la psychose. La belle idée de délocaliser, d’abandonner les quais de la Capitale pour le joyau balnéaire. Le décalage entre la luminosité éclatante du sable blanc et l’obscurité conquérante est prégnant : le soleil n’empêche pas la noirceur, plus il y a de soleil plus l’ombre sera portée. Et pour être portée... 

Caranne enquête. Il n’est pas seul. L’autre belle idée est de soigner l’arrière-plan, Caranne n’est pas un loup solitaire, un beau panel de seconds rôles qui n’ont rien de couteaux l’entoure. Mine de rien on s’attache. 

Si l’enquête tient en haleine, je crois que c’est surtout cette opacité accompagnant Victor, cet appétit pour la tragédie et cette volonté pas si affirmée de la fuir, qui me convainc à nouveau. 

Je suis le feu est de ces livres responsables des traits tirés et des cernes sous les yeux des libraires au petit matin (merci Max !).

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