dimanche 23 janvier 2022


Nous allons visiter le cosmos dans sa totalité, et nous faire la plus exacte idée de ce qu’il a été, est et sera. 

Au sommet d’une montagne vit une petite fille nommée Astrée, avec pour seule compagnie de vieilles machines silencieuses. Un après-midi, elle est dérangée par l’apparition inopinée d’un faune, en quête de gloire et de savoir. Mais sous son apparence d’enfant, Astrée est en réalité une très ancienne créature, dernière représentante d’un peuple disparu, aux pouvoirs considérables.

Le faune veut appréhender le destin qui attend sa race primitive. Astrée, pour sa part, est consumée d’un mortel ennui, face à un cosmos que sa science a privé de toute profondeur et de toute poésie.

A la nuit tombée, tous deux entreprennent un voyage intersidéral, du système solaire jusqu’au trou noir central de la Voie Lactée, et plus loin encore, à la rencontre de civilisations et de formes de vies inimaginables.

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La littérature française. Nous avons les errements d’une femme qui voit son couple se fissurer. Le fantôme du père qui hante et qu’il faut bien exorciser. Ou bien... Le Cosmos. L’espace infini, la galaxie. Andromède, Alpha du Centaure, c’est autre chose qu’une ferme dans le Berry ou un hôtel parisien. 

 Que l’on se confronte à l’indicible et la plume se doit d’acquérir une ampleur, une agilité digne de cette ambition invraisemblable : écrire l’univers et les merveilles qui le peuplent. Chaque mot, chaque adjectif doivent être pesés avec soin, on court le risque que les tournures de phrases tournent à vide, l’écriture vire impropre.

Le style de Romain Lacuzeau se fait ample, majestueux, à la lisière de l’amphigourique maniéré sans jamais y verser. La nuit du faune est un voyage incandescent mâtiné de hard science. Comme toujours, en ce qui me concerne, qui ait autant de compétence pour les concepts scientifiques un peu trapus qu’un crapaud buffle pour les barres asymétriques, quand la science tend à l’inconcevable, elle se mue en poésie étourdissante. Peu m’importe que les notions de bosons m’échappent, je revêts ainsi la peau du faune qui ouvrent des yeux immenses devant les beautés vertigineuses du cosmos et les dangers qu’il recèle.  

Romain Lacuzeau connaît ses gammes, multipliant les références (Philip José Farmer et son fleuve de l’éternité par exemple), sous l’influence discrète de Iain Banks (loué soit Iain M Banks, l’un des plus grands écrivains du vingtième siècle), il prouve qu’il a un goût très sûr l’animal.

Tout autant space-opéra métaphysique que conte philosophique, une sorte de Zadig interstellaire, La nuit du faune est un vertige, d’une plume magnifique qui n’a rien à envier à la littérature blanche des Galligraseuil.

Enfin, et ce fut assez peu souligné dans les critiques que j’ai lues de cette Nuit du Faune, ce roman est aussi une ode à l’amitié. Cette conjonction improbable de trois dissemblances qui peut accoucher d’une solidarité qui permet la traversée, qu’elle soit du cosmos ou du périphérique.

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