dimanche 30 janvier 2022


Mon corps n’est qu’un vêtement que je porte et qui souvent m’encombre.

Californie, 1997. Trente-neuf corps retrouvés dans une villa. Uniformes noirs. Draps mauves sur le visage. La mort semble être venue à eux paisiblement. Et pourtant, un signal clignote sur tous les ordinateurs : « Alerte rouge ».

Vingt ans plus tôt, Barthélemy, jeune hippie au bout du rouleau, rencontre Dieu lui-même dans un motel miteux. Pour devenir l’un des disciples de ce quadragénaire charismatique, il doit renoncer à l’amour, à sa famille et jusqu’à sa propre humanité. S’il y parvient, son maître lui a promis, il lui ouvrira les portes du paradis.

Pour l’auteur, tout commence le jour où il découvre le site Internet de la secte Heaven’s Gate. Comment peut-il être encore actif, alors que tous ses membres sont morts lors du suicide collectif ?

Première secte de l’ère Internet, Heaven’s Gate annonçait les tensions qui agitent nos sociétés contemporaines.

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Les bandeaux ceinturant les livres sont une plaie. Claquant une recommandation de lecture (rendez-vous compte François Busnel, Fuckin’ François BUSNEL !!! l’a aimé !), ils se déchirent, empêchent un parfait alignem... Un bourrage dans les rayonnages. Au mieux, ils finissent comme marque-page avant d’encombrer la poubelle jaune.

Pour Dieu est un voleur qui marche dans la nuit, je veux bien faire une exception.

Cet homme d’un certain âge, émacié aux oreilles proéminentes, les yeux exorbités, s’appelait Marshall Applewhite. Il porta plusieurs noms. Sur la fin, il choisit deux lettres : Do, pour quitter son véhicule, son corps, et rejoindre le vaisseau spatial qui se cachait dans le sillage de la comète Hale-Bopp qui frôla la terre en 1997.

1997 : 39 cadavres sont retrouvés en Californie, apparemment un suicide collectif.

Évènement, tragique, incompréhensible, dont Quentin Bruet-Ferréol s’empare. Il adopte une position étrangement rigoureuse, celle d’un observateur oxymorien, à la fois détaché et impliqué, un curieux chemin de crête qu’il réussit à conserver jusqu’à la dernière ligne. Un bel exploit.

Son livre est un voyage qui n’en finit pas de nous interroger.

Fin des années 60, début des années 70. Le flower-power tire sur son dernier joint, la fête est finie et la parenthèse se referme. La société ayant horreur du vide, cette soif d’expérimentations devait trouver à s’abreuver. Les sectes se multiplient comme les invectives sur un plateau d’une chaine d’infos en continu.

Applewhite promet alors un Eden aux alentours de Sirius ou Proxima du Centaure, ce n’est pas clair. Sa cosmologie repose sur deux piliers incontournables. Le rejet : en finir avec la famille, notre couple et nos enfants. Bannir les plaisirs terrestres, le corps n’est qu’une usine à caca, surtout : toujours réaffirmer un dégout hyperbolique du sexe, pas de kikou ni kikounette, la fête est finie !

Un mouvement apparemment inoffensif, aux adeptes polis et bien élevés. Une innocuité toute relative qui se finit dans la mort, trente ans plus tard.

Un livre déroutant, impossible à lâcher...

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