"Tout, finalement, est allé très vite après cette étrange conversation entre maman et moi à la cafétéria. C'était quelques mois avant que l'"événement" ne se produise, quelques semaines avant que l'Autre n'entre en scène.
Dans la mythologie norlandaise, le temps est circulaire, représenté par un serpent qui se mange la queue.
Depuis cette table, dans ma chambre de la clinique, jamais une image ne m'a semblé aussi juste.
L'événement, l'Autre ont toujours été là. A attendre sur un point du cercle. Et c'est moi, nous, toute la Norlande qui allions à la rencontre de ce point sans le savoir et sans pouvoir l'éviter."
Jerome Leroy imagine une contrée la Norlande qui ressemble à la gentille Norvège, mais ne l’est pas. Ce qui lui permet, enfin j’imagine, des entailles à la réalité. Dans ce bouquin intègre, cela procure également une distance, une mis à l’écart d’une émotion submersive.
Il est toujours délicat de critiquer une œuvre dont le sujet ne prête pas le flanc au dénigrement ricanant à moins de faire preuve d’un cynisme rance. Le cynisme est toujours quelque peu survendu je songe alors que je le pratique volontiers. Cependant, hormis la pertinence d’un tel ouvrage dans une sélection de littérature policière car Norlande n’est pas exactement un polar, ce livre n’est pas tout à fait le condensé poignant et la radiographie lucide qu’il aspire être.
Leroy surjoue une Norvège tolérante où sa jeunesse insolente va se geler les arpions dans une eau gelée et cristalline. Le polar nordique a depuis longtemps fait souffler un vent glacé propre à expulser la poussière nichée sous le tapis de neige. Je veux bien y voir une astuce narrative pour souligner le blast désillusionnant (quand même !) que fut le carnage du 22 juillet. Mais voilà, la naïveté touchante de Clara, ses pensées et sa reconstruction m’ont semblé amoindries, comme observées à travers un plexiglas.
Je ne doute aucunement de la sincérité de Jerome Leroy. Je la préfère plus sombre et tendue dans Le Bloc, un de ses livres précédents. Leroy ne voulait pas manquer de respect aux victimes, cela se sent et l’enraye. Un peu.
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