samedi 1 janvier 2022

Troisième lecture PMP 20222

Traduction : Marie Chivot-Buhler

« S’il était vrai que les forces de police étaient le miroir de la société, racisme et sexisme en faisaient partie de fait, la culture de la violence et de la xénophobie allaient de pair, aussi intrinsèquement américaines qu’un Colt de calibre quarante-cinq. »

Muté à la police de Chinatown, quartier de son enfance, Jack Yu est chargé d’une affaire de viol sur mineure. 

Si le secteur est à 99% chinois, les flics y sont, dans une écrasante majorité, blancs. 

Lorsque Jack doit enquêter sur le meurtre d’Oncle Quatre, le chef du gang des Hip Chings, les choses se compliquent : comment concilier sa quête de vérité avec la sensation d’être coincé entre deux mondes ?

Les clichés... Ils ont la vie dure. Je crois que les clichés ont leur part de vérité, difforme et déviante. Ils possèdent une tangibilité incertaine. Ils sont un peu inflammables, à trop les touiller dans la solution argentique, on verse dans les préjugés rances.

Comme pompe à fantasme, les quartiers chinois sont des Shadocks infatigables. Des communautés fermées sur elles-mêmes, imperméables et incompréhensibles où les tensions, misère et crimes ont un côté feutré, qui ne dépassent pas les limites urbaines de Chinatown.

Henry Chang, sino-américain, est né à Chinatown. Il s’applique dans ce polar à démythifier Chinatown sans en lever les mystères. On parle ici Du Chinatown, celui de New-York, théâtre du film mal-aimé de Michael Cimino. Le héros de Chinatown Beat, Jack Yu est un flic de Chinatown et il se confronte à la violence, aux trafics de drogue. Sous la plume nerveuse de Chang, les chapitres courts et vifs, on constate que le crime organisé répond à un universalisme poisseux. Les travers humains sont semblables et traversent les continents et les ethnies.

Ce que montre ce polar, c’est que ces foutus clichés font litière d’un racisme partagé. Ce que l’on ne comprend, on le réduit à des axiomes simplistes qui fondent nos élans primaires. Le racisme anti-asiatique est prégnant dans notre boule bleue. La fourberie des peuples jaunes est un présupposé largement répandu et Fu Manchu a de belles journées devant lui.

Plus que son histoire quelque peu convenue, c’est ce constat acide, ce regard posé, mi-amer mi-aimant, sur ce quartier déroutant, éloigné et proche qui convainc le plus. Et que notre monde finalement est un village : la soif de liberté et de respect soulève semblablement nos poitrines quelques soient nos origines et nos couleurs de peau et on les débusque souvent en usant des mêmes violences, à Lagos comme à Chinatown.

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