samedi 18 décembre 2021

Traduction : Sarah Amrani

« [...] un cercueil vide attend toujours que quelqu’un le remplisse. »

C'est l'automne à Parme. Le commissaire Soneri décide d'échapper à la grisaille de la ville en retournant dans son village natal des Apennins pour des vacances bien méritées. Il se réjouit à l'idée de cueillir des champignons sur les pentes boisées de Montelupo, une activité jadis partagée avec son père. 

Sur le village isolé règne la famille Rodolfi, producteurs de charcuterie depuis des générations. Le patriarche, Palmiro, mène sa barque d'une main sûre. Mais derrière la réussite, se profile un drame familial : le fils, Paride, a d'autres projets pour son avenir...

Brutalement, la famille est plongée au coeur d'un scandale financier qui touche toute la petite communauté : Palmiro aurait escroqué la plupart des habitants en leur faisant miroiter des placements financiers qui s'avèrent bidons. Peu après, un randonneur fait une découverte macabre dans les bois : le cadavre de Paride. 

Voilà qui signe la fin des vacances paisibles de Soneri, embarqué malgré lui dans une enquête où les relations complexes entre le père et le fils Rodolfi jouent un rôle prépondérant. Et en creusant, Soneri va se retrouver bien plus impliqué qu'il ne l'aurait souhaité, quand il découvre que son propre père et Palmiro étaient amis...

Le commissaire Soneri, las des jeux troubles et des coups bas de la questure (notre préfecture de police) de sa bonne ville de Parme, s’offre un trip régressif. Il revient sur les lieux de son enfance, son village natal des Appennins, au pied du sommet de Montelupo.

Notre jeunesse est une source infinie de fantasmes et de réinventions. Nous réaménageons nos souvenirs, nous en balayons d’autres, notre mémoire a la fiabilité d’un pronostic de Francis Lalanne. Cela nous maintient debout et nous conserve une santé mentale fonctionnelle

Je regardais pour la seconde fois Highlander dernièrement. J’’avais adoré ce film durant mon adolescence, je n’ai revu que carton-pâte, approximation et si on me chantonne Princes of Universe dans les tympans, priez pour que je n’ai pas d’objet contondant dans les paumes.

Toutes proportions gardées, Soneri fait l’expérience de cette amertume de cet écart entre l’attente du confort d’un cocon moelleux, de madeleines de Proust beurrées à la suite et le triste constat que le paysage a beau changé, les âmes qui l’arpentent répondent peu ou prou aux mêmes motivations. Quand les potentats locaux disparaissent, père et fils, Soneri qui n’aspirait qu’au calme des altitudes et retrouver une communauté, ne peut que constater qu’il est et restera un homme seul.

Entraîné malgré lui dans une enquête, Soneri constate amèrement que la Montagne ne masque pas de son ombre portée l’avidité, la soif de posséder et si la garde-robe est plus rustique, elle s’enfile de la même façon.

Un beau livre mélancolique, qui va chasser sur les terres de Erri de Luca, et pour l’amateur de randonnée que je suis, le souffle court et le silence y sont décrits magistralement, toujours cette plume charnue et poétique, toujours ce Soneri à la colère sourde, en butte avec son passé.

Superbe.

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