samedi 18 décembre 2021


Traduction : Jean-Christian Bouvier, Jean Viala & Jean-Paul Gratias

« Sa femme, Kazuko, était une bonne cuisinière et ils formaient un couple tranquille, sans enfant. »

Un homme, fasciné par les pickpockets, passe ses journées dans le métro. 

Un policier commet des délits pour envoyer les "coupables" en prison et les soustraire ainsi aux rigueurs de l'hiver. 

Un vieillard humilie les pauvres en jouant au "jeu de la charité".

Quelqu'un empoisonne les pigeons d'un temple en prenant soin d'avertir la police.

Une jeune femme se sert de la pitié humaine pour commettre des crimes.

Un vieil homme parle de sa passion du meurtre.

Un étrange maître chanteur prend pour victime un coiffeur...

Là vous vous dites, si c’est la phrase percutante qui doit initier le post, merci bien. Un peu comme un préambule de James Bond où 007 se calerait les joyeuses en regardant couler un café trop clair. Et pourtant cette phrase à priori anodine est emblématique de cette anthologie de nouvelles policières établie par Jean-Christian Bouvier. Car sous la surface polie, lisse, d’existences sans histoires couve une perversité, un grain de sable qui va gripper une machinerie qui devait améliorer sensiblement la patine de ces vies somme toute banales.

Je me faisais la réflexion dernièrement qu’il y avait longtemps que je n’avais revu Le crime était presque parfait du big Alfred, la gracile Grâce Kelly et l’infect (et prodigieux) Ray Milland et ses yeux pochés. Sans atteindre tout à fait la perfection formelle et la tension dramatique des chefs d’œuvres du Hitch, les Petits crimes japonais reposent sur un semblable schéma du détail qui fait tout foirer et à lire, c’est profondément jouissif et quelque peu pervers.

Kyotaro Nishimura n’a rien d’un moraliste, quelque fois le coupable s’embourbe, parfois la machinerie coulisse parfaitement et le ou la meurtrière peut savourer le contentement d’un travail bien fait. Alors, oui, nous ne sommes pas là devant une plume qui sublimerait l’horizon indépassable de nos peurs ou je ne sais quelle connerie, une table est une table et une chaise est placée devant, point barre. Mais la mécanique de ces nouvelles grinçantes (à l’exception d’une, plus faible), aux dénouements glaçants, nous fait l’effet d’un courant d’air dans une pièce déjà froide.

Surprenant et difficilement reposable, vous pouvez faire l’économie d’un marque-page japonisant pour harmoniser le truc, ce livre se lit quasiment d’une traite, comme un saké.

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