mardi 2 novembre 2021

Des chevaux fous de peur lancés au galop sur une foule brandissant des drapeaux rouges et noirs.

Les chefs d'État des huit pays les plus riches de la planète se retrouvent lors du G8. 

Face à eux, en marge du sommet, 500 000 personnes se sont rassemblées pour refuser l'ordre mondial qui doit se dessiner à l'abri des grilles de la zone rouge. Parmi les contestataires, Wag et Nathalie sont venus de France grossir les rangs du mouvement altermondialiste. Militants d'extrême-gauche, ils ont l'habitude des manifs houleuses et se croient prêts à affronter les forces de l'ordre.

Mais la répression policière qui va se déchaîner pendant trois jours dans les rues de la Superbe est d'une brutalité inédite, attisée en coulisses par les manipulations du pouvoir italien. Et de certains responsables français qui jouent aux apprentis-sorciers.

Entre les journalistes encombrants, les manœuvres de deux agents de la DST, et leurs propres tiraillements, Wag et Nathalie vont se perdre dans un maelstrom de violence. Il y aura des affrontements, des tabassages, des actes de torture, des trahisons et tant de vies brisées qui ne marqueront jamais l'Histoire.

Comment retranscrire une admiration sans tomber dans un cirage de pompe lénifiant ? Comment convaincre que le roman de cette rentrée littéraire est celui-là ? Et regretter cette dernière phrase : La nuit tombée sur nos âmes n’en a rien à foutre de la rentrée littéraire. Ce sera réciproque. Les prix littéraires (cet échange de bons procédés où le carnet d’adresse compte autant voire plus que le rendu final alors que nous sommes justement dans un prêté pour un rendu) ne feront pas tourner le dernier Frédéric Paulin dans leur playlist. À moins que je ne me trompe...

Frédéric Paulin rend justice. Qui se souvient de Carlo Giuliani ? Je ne suis pas sûr d’avoir jamais su son nom. Qui se rappelle ces scènes de répression inouïe en plein cœur d’une Europe arrogante, quand Berlusconi confie son service d’ordre aux fascistes upgradés. Le fasciste aime le Service si on enlève le R.

Juillet 2001, à Gênes, se réunit le G8 où les Grands de ce monde se déconnecte du monde en se gavant de petits fours, se félicitant de la marche de l’univers et d’être du bon côté du manche. Il se tient lors de ces agapes indécentes des contre-sommets où l’extrême gauche défile. Les autorités italiennes, nerveuses, font quadriller Gênes et organiser sciemment un entonnoir de violence, de bastonnade haineuse jusqu’au drame inévitable, le meurtre de Carlo Giuliani. Bientôt occulté par deux tours s’effondrant à New-York.

Frédéric Paulin ne met pas sur le même plan la violence policière et celle des black bloc, ce qui va lui coûter des critiques bienveillantes dans les pages de Valeur Actuelle je présume... Frédéric n’idéalise pas non plus l’extrême gauche, avec ses querelles de clocher, ses groupuscules qui se méfient les uns des autres, se réclamant d’une pureté idéologique quand les autres dévient nécessairement.

Paulin déroule encore ici son art consommé du rythme effréné et cette soif de comprendre. Factuel et précis, La nuit tombée sur nos âmes est une gifle, elle brûle les pommettes et dessille les paupières.

« Vous étiez prêts pour le massacre, bande de cons ? »

Je ne crois pas.

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