dimanche 14 mars 2021

 


Il est étrange de découvrir la vitesse à laquelle on s’adapte à l’univers étrange d’un service psychiatrique. On se familiarise avec la folie. Et pas seulement celle avec des autres, avec la sienne aussi. Nous sommes tous fous, je crois, d’une certaine façon.

Alice, jeune peintre britannique en vogue, vit dans une superbe maison près de Londres avec Gabriel, photographe de mode. Quand elle est retrouvée chez elle, hagarde et recouverte de sang devant son mari, assassiné, la presse s’enflamme. Aussitôt arrêtée, Alice ne prononce plus jamais le moindre mot, même au tribunal. Elle est jugée mentalement irresponsable et envoyée dans une clinique psychiatrique.

Six ans plus tard, le docteur Theo Faber, ambitieux psychothérapeute, n’a qu’une obsession : parvenir à faire reparler Alice. Quand une place se libère dans la clinique où elle est internée, il réussit à s’y faire embaucher, et entame avec elle une série de face-à-face glaçants dans l’espoir de lui extirper un mot. Et alors qu’il commence à perdre espoir, Alice s’anime soudain. Mais sa réaction est tout sauf ce à quoi il s’attendait…

(Traduction : Elsa Maggion)

J’en remets une couche concernant Sylvain T ? Sylvain T est un écrivain voyageur, un être liiiibre, de toutes contingences financières par exemple. Sylvain a un avis sur tout qu’il n’hésite jamais à donner, un poil pontifiant, un brin donneur de leçons. À la Grande Librairie, il avait asséné que le roman policier l’emmerde, il ne voyait pas l’intérêt de savoir qui a tué et comment, quelque chose dans le genre. Je l’ai déjà mentionné dans un de mes post précédent. Comme on dit, ce n’est pas parce qu’on n’aime pas, qu’il faut en dégouter les autres.

Le roman à énigme est une récréation réjouissante, une trappe ouverte dans laquelle on saute à pied joint : JE VEUX COMPRENDRE NOM D’UNE COUILLE EN BOIS ! Sylvain T est surement passé à côté du phénoménal Shutter Island de Dennis Lehane. Il ne lira probablement pas Dans son silence de Alex Michaelis.

Sans atteindre l’incandescence de Lehane, Michaelis construit son roman sur les mêmes fondations, celles, mouvantes, de l’esprit humain. Dans son silence est un manège jubilatoire, un jeu de pistes qui s’entrecroisent sur fond de psychanalyse, folie et peinture. Le tableau (donc) est chargé mais Alex Michaelis s’en sort avec les honneurs. Il connait son sujet, a le bon goût de ne pas nous ensevelir sous les termes techniques. Il rend la psychiatrie accessible, la démence pour les nuls en quelque sorte.

Evidemment, ce roman provoque en nous une prolifération d’hypothèse, et, comme par sa structure intrinsèque, il repose sur son twist final censé retourner sa mère plusieurs fois sans toucher terre... la déception est une probabilité non négligeable. D’autant plus que le style n’est pas renversant, ce n’est pas Crumley tâtant de la camisole. Attention, Dans son silence est d’une plume fluide, agréable et, surtout, efficace, rien ne doit faire obstacle à sa construction d’orfèvre, sa précision horlogère helvétique.

Et ça fonctionne par les dieux de l’enfer ! Je me suis bien fait taper par ce polar psychanalytique, comme si Irvin Yalom s’était mis au thriller. Alors oui, ce n’est pas aussi bien écrit que Sylvain T mais rien n’interdit de trouver Dans son silence bien moins chiant.

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