Le sentiment de culpabilité ne grandit pas. C’est un mensonge, chéri par les romantiques et les romanciers avides de sensationnalisme. Il ne grandit pas, il disparaît. S’il existe, c’est dès le début. C’est un mélange de culpabilité et d’horreur. Il est possible, rarement mais parfois, que cette combinaison conduise le criminel à se rendre. Mais avec le temps, ça lui passe. Il apprend à vivre avec, il oublie. Il se félicite même d’avoir échappé aux conséquences de son acte.
Simenon a une
grande aura sous nos latitudes. L’homme a une bibliographie aussi imposante que
le nombre de ses conquêtes (d’après ses dires... C’est étrange, j’ai toujours
du mal à croire ceux qui le claironnent) et inventa le commissaire bourru,
taiseux, la pipe aux lèvres, aussi nerveux qu’un sénateur en séance digestive à
la Chambre.
Je ne suis pas
un grand fan de Simenon, je ne déteste pas, loin de là, mais l’angle
psychologie au scalpel et mise à nue de la bourgeoisie crapoteuse me semble
parfois survendu. Et parfois non.
John Wainwright
est un romancier Simenonien, Chabrolien. Il est inimaginable de ne pas songer à
ces deux références en lisant Les aveux. Wainwright est surtout connu pour son
roman Brainwash publié en français sous le titre À table ! Claude Miller
l’adapta au cinéma, il devint le film Garde à Vue, remarquable, un choc de
deux acteurs se faisant face, se tournant autour comme deux requins cannibales.
Les aveux, c’est
Garde à vue à l’envers. C’est le meurtrier qui cherche à convaincre le flic de
sa culpabilité. Ce pharmacien sans histoire, un peu terne, veut éperdument
persuader l’inspecteur Lyle qu’il a empoisonné son épouse un an auparavant.
Pourquoi cet homme qui n’a jamais été soupçonné vient-il se livrer ?
Est-il vraiment coupable ? Pourquoi s‘accuser d’un crime que l’on n’a pas
commis ?
Ce polar roublard
va répondre à ces trois questions. Le livre alterne la confession du potentiel
assassin dans un « je » omniscient et l’interrogatoire dans un « il »
plus distancié. Wainwright joue là une partition bien connue, une alternance des
points de vue, où le lecteur se méfie du « je ».
Les aveux est un duel matois entre un vieil inspecteur à qui
on ne la fait pas et un « notable » comme on dit. Ces petits
hobereaux provinciaux et crapoteux si bien décrits dans les films de Chabrol. Ceux
qui, rêvant d’une vie plus grande que la leur, accusent celles et ceux qui les
entourent de l’étroitesse avérée de celle qu’ils vivent réellement.
Un polar rusé, qui se lit plus vite que Maigret bourrant sa pipe.
(Traduction : Laurence Romance)
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