jeudi 26 mars 2020


"Papa m'a dit un jour que toutes les histoires d'horreur connaissaient un dénouement heureux, mais il se trompait. Regarde comment il a fini. Noah, un dénouement heureux, ça n'existe pas. Les chansons, les livres et les films qui se "terminent bien" s'arrêtent tous au "bon" moment. Ils ne racontent pas toute l'histoire. Seules les anciennes tragédies disent la vérité. Beowulf triomphe de Grendel et de sa mère, mais uniquement pour périr en combattant un dragon. Gilgamesh perd son meilleur ami. Achille aussi. Dans Hamlet, tout le monde meurt. C'est la seule vérité"


Salutations confinées les aminches.

Deux assertions vont irriguer ce post : 

- HP Lovecraft est l'un des écrivains les plus surestimés de nos jours. Certes, il a pour lui d'avoir créé un univers mais son style est plus chargé que Keith Richards dans les années 70. Au bout du cinquième "indicible", je décroche un peu. HP Lovecrat, c'est un peu une IA folle et limitée qui pondrait des synonymes à la file pour dire la même chose encore et encore : nous n'avons aucune foutue chance et on va tous crever après être devenus déments.  Ce dont on se fout car la proximité avec les personnages, l'identification nécessaire qui doit fonctionner pour que l'on se sente concerné un minimum, n'existe pas. J'ai connu des bonbonnes d'azote liquide plus chaleureuse..
Mais... 
[et c'est un gros mais, il se justifie ici et ne pollue pas inutilement mon propos, tant j'ai cette sale manie de coller des "mais" partout]
... Lovecratf a créé un univers bien à lui, une cosmologie, qui a irrigué un large pan de la littérature américaine puis mondiale. Il a eu la bonne idée. Comme le mec qui a intuitionné le post-it en somme...

- La littérature américaine est certes celle de l'envolée, des grands espaces, de la nature mais aussi celle de la famille (Pastorale américaine de Philip Roth, Franzen et j'en passe , tellement que j'aurais honte sans cette toute puissance du blogueur décomplexé).

Et si l'on mélangeait les deux, hum..?


La Famille Turner, de Vandergriff (Texas), se tient sur le seuil d'un monde terrifiant dominé par une cosmologie de monstres. Est-ce le leur ou est-ce le nôtre ?

Voilà l'un des grands romans américains de ces dernières années, un immense bouquin sur la perte, le deuil et la famille. Et oui il y a des monstres... La prévention, bien française, envers la littérature de l'imaginaire empêche ce livre de trouver un cercle plus large que le lectorat moins autocentré sur les errements nombrilistes d'un.e petit garçon/petite fille riche esseulé.e dans un hôtel particulier avenue Foch...

Saluons ici l'excellence de la collection Imaginaire de Albin Michel rassasiant nos paupières, pépite après pépite...

Portée par une excellente traduction, une plume fine et un sens de la dramaturgie acéré, Une cosmologie de monstres est une chronique haletante, poignante d'une famille américaine sur plusieurs générations. D'inspiration Lovecraftienne donc, mais où l'identification joue à plein. On s'attache aux Turner et leurs cauchemars deviennent les nôtres. 

Si Hamill s'appuie sur l'archétype archi rabâchée du monstre qui n'en est pas un et ce n'est pas celui que l'on croit qui en est un... Il rebat les cartes avec maestria et joue des apparences (sexuelles, métaphysique, psychiques). 

Très très grand roman qui explose les codes du genre dans lequel on le case. 

Inspirons un grand coup, Imaginaire et Fantastique ne sont pas des gros mots...

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