vendredi 21 septembre 2018


"La propriété privée de la terre, cette invention relativement récente qui bouscula des millénaires de gestion communautaire des ressources naturelles, devint le principal outil de la domination européenne sur les cinq continents. Le libéralisme politique, idéologie occidentale dominante, idéologie de domination occidentale, voisina sans encombre, pendant plusieurs siècles, avec l'esclavage industriel, le racisme scientifique, l'orientalisme, l'antisémitisme, l'eugénisme, et la pratique assidue du génocide colonial. La propriété, en un mot, ce n'est pas seulement le vol. Prendre la terre, c'est aussi administrer la mort."

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Yá'át'ééh (enfin je crois) les aminches.

Je devais avoir une dizaine d'années à tout briser. Je me suis faufilé derrière le canapé de mes parents pour capter LA MORT AUX TROUSSES de Hitchcock. J'ai eu le temps d'apercevoir Cary Grant accroché au nez d'un président taillé dans la pierre avant de me faire découvrir.

Et je suis resté très longtemps la dessus rapport au mont Rushmore. 

Longtemps après, je me suis fait la réflexion qu'un tel travail titanesque pour accoucher d'une telle laideur, ce n'était pas rien...

Finalement, le mont Rushmore est le symbole chimiquement pur de la spoliation à grande échelle qu'ont subie les amérindiens. Spoliation rendue possible par une épuration ethnique soigneusement mise en oeuvre. Aucunement accidentelle, résultat de temps épiques. 

La conquête de l'Ouest fut surtout le chantier d'un vaste génocide.

Telle est la thèse de :


Ce livre est né d'un constat. Débattant avec le célèbre historien Howard Zinn de son grandiose HISTOIRE POPULAIRE DES ETATS-UNIS, premier ouvrage à retracer l'histoire par le bas, celle de ses victimes, Roxanne Dunbar-Ortiz déplore que Zinn ne se départ pas d'une mythologie forgée de toutes pièces, un point de vue eurocentré. 

Howard Zinn l'encouragea à écrire son propre ouvrage et rétablir la réalité. 1492 n'est pas la découverte d'une terre vierge. Les amérindiens ne sont pas des sauvages à moitié cannibales : leur civilisation était avancée, avec une grande attention portée à l'hygiène personnelle quand nous vidions nos pots de chambres à même la chaussée.

Roxanne Dunbar-Ortiz insiste sur un point, le massacre des indiens ne tint pas à une guerre de territoire avec des colons prompts à la gâchette mais fut aussi (et surtout) pensée, organisée par les gouvernements fédéraux successifs. Mention spéciale au septième présidents des States Andrew Jackson, qui orne toujours les billets de 20 dollars, grand massacreur devant son Éternel blanc de peau, grand tueur d'indiens et fier de l'être.

Le livre de Dunbar-Ortiz, très accessible, déroule une litanie désespérante et répétée de guerres asymétriques, de violations de traités. Une annihilation définitive pour déclarer que le problème indien est définitivement réglé. 

Seulement voilà : "Spoiler alert : la période coloniale n’est pas close – et tous les Indiens ne sont pas morts. » Robin Kelley, historien, UCLA

Le bouquin est encore plus pertinent une fois la honte nationale de Wounded Knee achevée (quand on songe que les médailles accordées aux soldats qui ont exterminées des femmes, enfants et vieillards épuisés, n'ont jamais été retirées...). On voit s'installer un système pointu d'un assujettissement légal. Édifiant. 

Le mont Rushmore, quant à lui, appartenait aux indiens Lakota mais ils perdirent leurs terres en 1876-1877 et un certain  Gutzon Borglum sculpta les visages monumentaux des quatre présidents que l'on connait aujourd'hui.  Gutzon Borglum à qui l'on connaissait des sympathies pour le Klan... Comme quoi...

Quel orgueil de merde il faut quand même pour défigurer à ce point une montagne...

Les Etats-Unis n'ont rien d'une nation guidée par la morale. Ils sont juste au niveau de nous autres...

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