dimanche 2 avril 2017


- J'ai essayé, Chicot, je te jure que j'ai essayé...
J'aurais pu être un bon roi, si je n'étais né dans un si mauvais siècle.
- Tu n'es pas un roi, Henriquet, mais une REINE !

***

Salutations les aminches.

Il y a quelque temps déjà, je patientais avec mon CHARLY 9 de Richard Guérineau. Je voulais le dédicacer, et la dédicace en BD prend plus de temps, mais le coup de fusain vaut largement l'attente. 

Et me voilà à papoter avec l'auteur...



... Très sympa d'ailleurs et il me confie qu'il planche sur un autre projet, le successeur de Charles IX, son petit frère HENRY III.

"- Je te le dessine
- Ouais ç'serait super."



Alors moi, du coup, j'attends.

J'attends...

J'attends.

Et :


Mai 1574. 

Charles IX meurt, laissant son royaume déchiré par les guerres de Religion et toujours sous le choc du massacre de la Saint- Barthélemy. 

Catherine de Médicis rappelle son fils cadet Henri, alors roi de Pologne… 

Henri III aura surtout marqué l’Histoire par ses mœurs et ses frasques, avérées, qui auront masqué l’incroyable complexité politique à laquelle a dû faire face ce monarque atypique.

Henri III et ses mignons, le partouzard qui masque le roublard. 

Richard Guerineau avait déjà adapté avec un talent fou le livre de Jean Teulé CHARLY 9, là il est seul aux critériums et signe une BD étourdissante. 

S'appuyant sur un rigoureux travail d'historien, Guérineau traque l'essentiel derrière l'anecdotique. Certes, Henri III était presqu'à coup sûr un valeureux homosexuel et il avait la chance d'être le roi ce qui lui évita le bûcher. L'était surtout un vigoureux bisexuel, hommes et femmes comblaient son solide appétit.

Il était, avant tout, un fin monarque. 


Quelle époque les filles ! La Saint Barthélemy encore poisseuse, les protestants remontés à bloc, les ligueurs ultra catholiques menés par le duc de Guise harcelant le souverain, le pitit dernier de la fratrie François qui se verrait bien roi de France lui aussi et la fuckin' mother Marie de Médicis, fourbe et virago...

Henri III doit louvoyer entre ces esquifs, démentant la supposée toute puissance du Roi de France, Louis XIV est à quelques siècles d'éclore.

Comme pour CHARLY 9, Guérineau alterne les styles. 

Se reposant le plus souvent sur un crayon fluide et précis, une ligne claire soyeuse et encore plus travaillée, me semble-t-il, surtout au niveau des couleurs :


Il se fait aussi vieille France, couleurs pastels, nostalgiques des albums d'antan sur notre belle histoire de France (et de Navarre, tient, pour sûr) : 



Guérineau a une incroyable matière à pétrir, façonner et recaser. 

Le danger était de se noyer, de nous noyer sous le didactique ou nous étouffer sous les détails scabreux des fistules analo-royales. 

Richard évite superbement es traquenards et nous portraitise un souverain rusé, touchant parfois, malicieux aussi. C'est quand même lui qui va populariser le bilboquet en France. Le bilboquet, hein : faire rentrer le trou dans le pieu. 

Un destin tragique bien sûr, un royaume ingouvernable, un Sysyphe évitant un complot, une rébellion ici pour en contrer une autre là, reculant, avançant et zigzaguant. 

Impitoyable aussi, l'honneur gentilhommesque très peu pour Henriquet : si tu dois loger une dague dans une omoplate dans le dos, le noir et masqué, sans problème. Il le vit très bien !

Richard Guérineau désacralise à toute blinde, démystifie et finalement réhabilite (faute d'un autre terme) un monarque raillé en tata Yoyo de gay Pride.

Déclinant une large palette de sentiments du Shakespearien politique au Rabelaisien égrillard, sans omettre de nous distiller ces pastilles humoristiques qui égayaient déjà CHARLY 9 : 



Guérineau nous livre encore une fois une petite merveille, érudite et savoureuse. 

Gageons qu'il continuera dans cette veine de peinture caustique d'un règne, (même s'il a dores et déjà affirmé qu'il ne croquerait pas Henri IV).

Pour notre plus grand bonheur.

Allez un dernier : 



Ok.

On dirait une drag queen débarquant à un bal masqué décadent de backroom  à Ibiza...

Mais ce coté "je vous emmerde".

J'sais pas...

... Ça a d'la gueule.

7 commentaires :

  1. Bon je n'ai pas lu la BD, et je ne sais pas ce qu'il en est exactement mais, là, le coté "Henriquette", "queen" et "poses drag queenn" franchement je trouve cela très gonflant. A chaque fois en france c'est la même chose: si une personne est soupçonnée d'homosexualité ou de bisexualité ça y est, ça devient une grosse tata ! Et pour ma part ça ne me fait plus rire du tout. C'est comme "y a bon bannania", ou la vision de l'islam avec un Mahomet caricaturé dans chaque numéro d'une certain magazine ... ça ne fait plus rire à force de répétitions. Ce sont des visions stéréotypées, fausses, et extrêmement caricaturales qui propagent finalement des idées qu'elles ne veulent pas dire, car oui répéter à longueur de temps ces poncifs c'est les propager comme étant vrai.
    Ton BBF un peu énervé sur le coup :)

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    1. Ahem... je vois.

      Bon alors. Je ne voulais blesser personne et je suis certain que Richard Guerineau non plus. Il lui était difficile de nier l'homosexualité de Henri III.

      Je crains surtout que la conclusion de mon post n'est pas des plus réussies et réduit cette BD à ce qu'elle n'est pas.

      Quant au magazine français, étant abonné, je peux t'assurer que la dernière caricature de Mahomet remonte au fameux "tout est pardonné" et non il n'y a pas une caricature de Mahomet toutes les semaines.

      On pourrait débattre d'ailleurs en quoi caricaturer Mahomet serait plus sensible que débiner Jésus qui prend bien cher aussi dans Charlie. Mais c'est un autre débat.

      Brefle, je te prêterai à l'occasion HENRIQUET...

      Ou pas :)

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  2. Il ne s'agit pas de blesser quelqu'un. Le problème vient en fait des idées derrière ces représentations. Qu'est ce qui d'après toi fait que l'on représente un homosexuel sous les traits d'une "femme" ? Qu'est ce qui fait qu'on représente les noirs comme n'arrivant pas à parler français correctement ? Les idées derrières sont très simples: un homosexuel n'est pas vraiment un homme et un noir n'est pas aussi intelligent qu'un blanc. Ce genre de stéréotype qui passent sous le couvert de blagues sont tout sauf anodins. D'ailleurs le plus grave est que l'auteur n'a probablement effectivement pas voulu blesser qui que ce soit mais il propage pourtant cette pensée: un homo c'est entre la femme et l'homme. Henri était homo ? Et alors doit-il ressembler à une drag queen pour autant? Est-ce que dans Charly IX l'auteur l'a représenté ainsi ? Comme je l'ai dit le problème n'est pas de sentir blessé, le problème est de combattre des idées, qui pour moi sont révoltantes. Ces idées sont d'autant plus dangereuses qu'elles se propagent sans dire ce qu'elles sont et qu'elles deviennent des vérités...
    Pour Mahomet je remets le débat à une discussion de vive voix ;).

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    1. Tu as raison, il ne s'agit pas de blesser quelqu'un. ni de faire de Henri III le, je ne sais pas, disons le modèle fantasmatique de l'homosexuel "moyen" tout comme DSK n'est pas "l'hétéro" moyen.

      La dernière image de mon post a été relaté dans divers chroniques et du reste se déguiser en femme était pratique courante à la cour quelque soit son orientation sexuelle.

      laissons la parole à Guerineau tient :

      "« A un banquet organisé au château de Chenonceau, Henri III apparaît costumé en femme. La scène est relatée dans de nombreux témoignages d’époque, et a beaucoup contribué à la réputation de sodomite, homosexuel ou hermaphrodite du roi. On appellerait cela du “bashing” aujourd’hui… Il apparaît étrange qu’on se soit autant étonné de la chose, alors qu’il était chose courante pour les hommes de se travestir à des fêtes. Etait-ce plus choquant parce qu’il s’agissait du roi ?"

      Sans aucun doute, D'aubigné parlant de "putain fardée". Dans Charly 9 il est représenté normalement, d'ailleurs il ne se travestit jamais en femme hors la planche sus citée.

      Après ce genre de stéréotype qui se propage (et je crains que ce ne soit un phénomène mondial dépassant de loin les frontières de l'Hexagone), je ne saurais le nier, à moins de faire preuve d'une phénoménale mauvaise foi, je trouve juste que Henriquet, la BD, ne participe pas de ce mouvement.

      Mon post peut-être (va savoir, à baigner dans un climat poisseux on ne saurai toujours s'en préserver) mais bien involontairement.

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    2. Désolé d’insister mais je vois bien qu’il y a incompréhension… D’ailleurs en citant cette phrase qui fait le lien entre se déguiser en femme et l’homosexualité tu es parfaitement en lien avec ce dont je te parlais. D’où vient cette idée qu’un homosexuel devrait ressembler à une femme si c’est un homme et à un homme si c’est une femme ?

      Pour ce qui est de DSK, je dois dire que je ne vois pas le rapport. Est-il à un moment présenté comme l’hétéro moyen ? Les hétéro sont-ils à un moment représenté comme étant tous des violeurs et dépravés sexuel ?

      Le fond du problème de toute façon ce sont, encore une fois, tout comme pour le racisme, les idées qui ont donnée naissance à ces stéréotypes soit-disant comique. Les noirs n’arrivent pas à articuler et bien parlé. D’où cela vient-il ? De l’idée qu’ils sont inférieur. Les hommes efféminés, qui se déguisent en femme sont homo. D’où cela vient-il ? De l’idée que ce ne sont pas vraiment des hommes. Voilà ce que moi je dis et je dénonce.

      Et la BD avec son titre « l’homme-reine » et sa couverture, sur simple justificatif qu’Henri III était homosexuel participe à ce stéréotype et aux idées qui sont derrières. Ce qui est grave c’est qu’on passe souvent à côté de ces éléments de « propagande stéréotypante » et qu’on les intègre finalement comme normal. J’ai moi-même mis du temps à voir toute l’horreur qu’il y avait dans « y a bon banania » et ce qu’il y avait derrière car finalement cela semblait une plaisanterie du quotidien bien anodine. Non, ce n’est pas le cas. C’est une plaisanterie raciste. Il en est de même pour la représentation de l’homosexualité masculine par des homme-femme. D’ailleurs c’est depuis la chrétienté qu’il y a ce problème et ce sont eux qui ont voulu et réussi à imposer cette image d’hommes qui n’en seraient pas.

      Enfin, ce n’est pas ton post le problème, il est juste en accord avec notre monde, et je me permettais simplement de te dire : attention. Les homosexuels ne sont pas différents des hétérosexuels ou des bisexuels, les hommes n’ont pas plus de raison de ressembler à des femmes et le dire n’est pas une plaisanterie insignifiante. On n’y pense pas forcément, mais la représentation devient finalement la norme. Mon but était de te le faire remarquer et de t’y faire réfléchir.

      PS : désolé j’ai pas braqué ton anonymat… c’est qu’on doit être des homonymes :).

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    3. Me le faire remarquer et m'y faire réfléchir... J'aurais tendance à dire "mission accomplie" :d

      Je voulais souligner qu'à mon avis Guérineau (et ce n'est que mon avis car je ne suis pas dans sa tête) ne voulait pas faire de sa BD un "manifeste" il n'envisage pas Henri III comme un homosexuel forcément dévoyé mais un souverain extraordinaire dans une période extraordinaire. Mais il répond peut-être inconsciemment à un pré-pensé. Ce qui aurait tendance à m'orienter sur une réponse négative, c'est que sa BD n'est pas pure fiction et s'appuie sur une base histoqrique que l'on peut difficilement nier. Après... Je ne sais pas.

      Le y a bon banania ne fait pas rire car cela repose sur un abaissement c'est vrai, (ça me fait penser au film 'chocolat" d'ailleurs, je ne sais si tu l'as vu)

      Tout dépend de l'intention de l'auteur et ce l'on pense qu'il y met, enfin je crois.

      Quant à l'anonyme bis c'est un roux velu qui a survécu à une saine élimination : pour l'instant... :-d

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  3. P'tain, y'a un nanonyme qui m'braque mon nanonymat, là, c'est quand même un monde, ça ! Et y t'oblige à t'planquer derrière une citation, en plus, l'salopiaud ! Tout ça pour éviter de parler du génocide des Roux à travers l'Histoire, en plus.

    Et dire que pendant c'temps-là, faut que j'en sois réduit à l'épisode 17 de Walking Dead pour apprendre la mort de Bernie Wrightson...


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