dimanche 2 avril 2023

Traduction : Alexandra Carrasco et Georges Tyras

« Tout est parti en couilles en sept coups de fusil. »

***

Keegan et Zambrano, deux narcotrafiquants, se battent à bord d'un Cesna bourré de cocaïne qui finit par s'écraser. La cargaison se retrouve disséminée dans la campagne argentine. 

Survivants du crash, Keegan et le pilote sauvent une partie de la drogue et volent une voiture pour l'emporter. Mais ils savent que le reste va exciter les convoitises. 

Entre le gang qui veut récupérer son dû et les pauvres qui voient dans cette drogue une manne inespérée, une course poursuite s'engage.

***

Je ne me lasse pas la phrase liminaire du fabuleux roman noir de Nicolas Ferraro. C’est pourtant une phrase piégeuse, porteuse d’une ambition difficilement tenable et d’une facilité tentatrice. Cette phrase est à la fois une promesse d’un polar nerveux, vif et sans temps mort (il n’y a guère que le temps qui ne sera pas mort...) et possiblement une impasse.

La possibilité dangereuse d’une réduction à un polar plaisant, cartoonesque et violent mais sans profondeur. Un petit Tarantino, version Les huit salopards, chatoyant mais qui tourne à vide. Un joli rendu mais sans perspective, le creux qui claque.

C’est donc un sacré chemin de crête, un à-pic à peine plus large qu’une semelle entre le vide jouissif et le « rendez-vous compte de l’état du monde » pontifiant. Cette Dernière part du ciel fait la jonction entre la forme et fond. Il dynamite et revitalise le roman noir narco. D’une histoire simple, des sacs de coke égaré par un avion au-dessus de la pampa, Ferraro parabollise l’impossibilité d’échapper à sa destinée.

Elle est là l’illusion crevarde que le capitalisme est une somme d’opportunités qu’il faut savoir saisir pour s’extraire, s’élever. Car après tout, cette cargaison tombée du ciel est l’occasion de mettre en pratique les mantras des gourous du libéralisme qui nous braillent de s’emparer de ce l’univers nous offre pour forcer sa chance. Et de chance finalement ce n’est que contingences à aligner...

Ça c’est sans compter que les intérêts bien compris restent entre les mêmes mains et qu’il se trouvera toujours des nervis, des brigades maniant la matraque, le fusil scié ou la tronçonneuse pour que l’on comprenne bien l’intérêt de rester à sa place.

Violent certes mais jamais gratuit (et depuis quand gratuit est un qualificatif qui dégrade ?). Rien n’est jamais gratuit.

Ce livre commence en couilles et finit par un basta. Entre les deux on prend un plaisir ambigu, un shoot d’adrénaline, montée et descente, sans chercher une veine, tout passe par les paupières.

Un putain de bouquin !

0 commentaires :

Enregistrer un commentaire