"Les gens vraiment gentils, quand ils commencent à atteindre un âge avancé, réagissent avec un tel sentiment de révulsion devant les horreurs qu'ils affrontent qu'ils préfèrent en général se suicider. Il n'y a que nous, les types légèrement malveillants, qui réussissons à survivre à cette prise de conscience, et à trouver une sorte de plaisir - ou du moins de satisfaction - à regarder comment la dernière génération, ou l'espèce tout récemment évoluée, trouve le moyen de redécouvrir et de reparcourir les sentiers battus menant au désastre, à l'ignominie et à la honte, alors que nous avions naïvement cru qu'ils étaient devenus impraticables.
- Donc, au fond, vous restez dans le coin pour nous regarder nous foutre dans la merde ?
- Oui. C'est une des rares constantes garanties dans la vie."
***
Salutations les aminches.
A y est.
Fallait bien.
J'ai clos le cycle de la Culture. Cette étourdissante société pan galactique imaginée par l'auteur britannique Iain M Banks.
Écrivain prolifique et génial, (consacré sixième meilleur auteur britannique de tous les temps dans un sondage de la BBC), Iain M Banks s'est éteint le 9 juin 2013 suite à un cancer foudroyant.
Je ne sais si Iain était au courant de son état quand il a composé LA SONATE HYDROGÈNE, dernier opus, par la force des chose, du cycle de La Culture.
Les Gziltes – des humanoïdes proches de la Culture – ont pris la décision de suivre la voie empruntée par des millions d'autres civilisations avancées : la Sublimation. Quitter l'espace normal et rejoindre un niveau plus élevé inconnu, mais, où la vie est infiniment plus complexe et riche.
Seulement, à quelques jours de la Sublimation, le Quartier Général Militaire des Gziltes est détruit. Peut-être parce qu'il détenait un secret susceptible d'entraver ce passage au stade supérieur.
Vyr Cossont, assistée d'un androïde et d'un avatar de la Culture, est envoyée à travers la Galaxie pour une mission impossible : retrouver la trace d'un homme qu'on dit vieux de dix mille ans et qui est censé connaître le secret des Gziltes…
Iain se savait-il condamné ? On pourrait le penser quand on songe que la Sublimation est l'arrière plan métaphysique de LA SONATE HYDROGÈNE. Cependant, la Sublimation hante une bonne partie du Cycle et il n'est pas étonnant qu'il se penche sur ce passage à une autre dimension sans rien en dire car comme le dit l'un des protagonistes : parler de Sublimation à une I.A. même surpuissante revient à expliquer la beauté d’une mélodie d’opéra à une guêpe.
Il ne faut voir en LA SONATE HYDROGÈNE aucune conclusion définitive du cycle de La Culture mais un roman qui s'insère dans la trame et qui montre à quel point Banks a mûri son univers sur 25 ans.
LA SONATE truste le haut du panier sidéral. Si elle n'atteint pas le niveau du SENS DU VENT, le chef d'oeuvre de La Culture ou encore L'USAGE DES ARMES le plus diaboliquement construit, il s'agit peut-être du chapitre le plus burlesque de la saga.
Comme toujours, l'imagination sous stéroïde est au pouvoir. Qu'on en juge :
- L'héroïne s'est fait greffer une paire de bras supplémentaire pour pouvoir jouer correctement la Sonate Hydrogène, morceau censé représenter la complexité des atomes composant l’univers dont l'hydrogène. Un morceau de musique célébrant la pureté et la beauté du cosmos mais qui se révèle aussi dissonant qu'un ongle sur un tableau avec Céline Dion jodlant une chanson à boire en fonds musical.
- Un groupe de vaisseaux de la Culture enquillant les noms improbables : le J'ai Vu De La Lumière Et Je Suis Entré ou bien encore le C'est Toujours Mieux Que Bosser etc (un gros etc). Sans oublier le N'allez Pas Confondre... Dont le nom entier est le plus réussi du cycle.
- Une variété extraordinaire de créatures alien exotiques :
"le tout dans le langage des Liseiden, qui consistait en une série de rots liquides non dénués d'une certaine harmonie."
- La description hallucinée d'un ballon dirigeable rassemblant les futurs Sublimés dans une sorte de partouze géante et continue les cinq années précédant la Transition. Le capitaine de Zeppelin qui s'est fait installer trois cœurs supplémentaires pour pouvoir alimenter la trentaine de pénis auxiliaires greffés sur l'ensemble de son corps... Et bien... C'est quelque chose.
Banks ne se départit pas de ce ton décalé, cette musicalité qui fait dire que son space tient parfois autant du cake que de l'opéra. La causticité rigolarde de la plume ne masque pas totalement la profondeur de Banks qui ne manque jamais de s'interroger sur le Sens de tout ça, sur les limites et les dangers d'une toute puissance technologique:
"Une fois qu'on était capable de modéliser de façon fiable des populations entières dans un environnement simulé, au niveau de détail et de complexité signifiant que les individus au sein de cette simulation avaient une sorte d'existence autonome, la question devenait : jusqu'à quel point voulait on jouer à être un dieu, jusqu'où était on prêt à aller dans la cruauté ?"
LA SONATE HYDROGÈNE est clairement le plus "baston" des romans Culturiens, ça fighte méchamment.
"Mais espèce de folle, je suis un foutu putain de vaisseau armé jusqu'aux dents ! Je ne suis ni mâle, ni femelle, ni je ne sais quoi encore. Je suis fabuleusement intelligent, et là, juste maintenant, je suis réglé pour cogner."
La plume de Iain fait encore une fois merveille pour donner vie à ces combats épiques, même si, je l'avoue, ce n'est pas ce que je préfère.
In fine, on ne peut que constater que Banks évacue quelque peu son dénouement et que le grand secret ressemble à un têtard rouillé. Mais peu importe, le voyage compte bien plus que la destination, la route empruntée que le point de vue final.
Tout l'inverse de la Sublimation quand on y songe.
Iain qui a eu le mauvais goût de se sublimer.
Je ne sais pas où il est. Si même il est quelque part. Si il y est... Je suis certain qu'il ricane encore.
A y est.
Fallait bien.
J'ai clos le cycle de la Culture. Cette étourdissante société pan galactique imaginée par l'auteur britannique Iain M Banks.
Écrivain prolifique et génial, (consacré sixième meilleur auteur britannique de tous les temps dans un sondage de la BBC), Iain M Banks s'est éteint le 9 juin 2013 suite à un cancer foudroyant.
Je ne sais si Iain était au courant de son état quand il a composé LA SONATE HYDROGÈNE, dernier opus, par la force des chose, du cycle de La Culture.
Les Gziltes – des humanoïdes proches de la Culture – ont pris la décision de suivre la voie empruntée par des millions d'autres civilisations avancées : la Sublimation. Quitter l'espace normal et rejoindre un niveau plus élevé inconnu, mais, où la vie est infiniment plus complexe et riche.
Seulement, à quelques jours de la Sublimation, le Quartier Général Militaire des Gziltes est détruit. Peut-être parce qu'il détenait un secret susceptible d'entraver ce passage au stade supérieur.
Vyr Cossont, assistée d'un androïde et d'un avatar de la Culture, est envoyée à travers la Galaxie pour une mission impossible : retrouver la trace d'un homme qu'on dit vieux de dix mille ans et qui est censé connaître le secret des Gziltes…
Iain se savait-il condamné ? On pourrait le penser quand on songe que la Sublimation est l'arrière plan métaphysique de LA SONATE HYDROGÈNE. Cependant, la Sublimation hante une bonne partie du Cycle et il n'est pas étonnant qu'il se penche sur ce passage à une autre dimension sans rien en dire car comme le dit l'un des protagonistes : parler de Sublimation à une I.A. même surpuissante revient à expliquer la beauté d’une mélodie d’opéra à une guêpe.
Il ne faut voir en LA SONATE HYDROGÈNE aucune conclusion définitive du cycle de La Culture mais un roman qui s'insère dans la trame et qui montre à quel point Banks a mûri son univers sur 25 ans.
LA SONATE truste le haut du panier sidéral. Si elle n'atteint pas le niveau du SENS DU VENT, le chef d'oeuvre de La Culture ou encore L'USAGE DES ARMES le plus diaboliquement construit, il s'agit peut-être du chapitre le plus burlesque de la saga.
Comme toujours, l'imagination sous stéroïde est au pouvoir. Qu'on en juge :
- L'héroïne s'est fait greffer une paire de bras supplémentaire pour pouvoir jouer correctement la Sonate Hydrogène, morceau censé représenter la complexité des atomes composant l’univers dont l'hydrogène. Un morceau de musique célébrant la pureté et la beauté du cosmos mais qui se révèle aussi dissonant qu'un ongle sur un tableau avec Céline Dion jodlant une chanson à boire en fonds musical.
- Un groupe de vaisseaux de la Culture enquillant les noms improbables : le J'ai Vu De La Lumière Et Je Suis Entré ou bien encore le C'est Toujours Mieux Que Bosser etc (un gros etc). Sans oublier le N'allez Pas Confondre... Dont le nom entier est le plus réussi du cycle.
- Une variété extraordinaire de créatures alien exotiques :
"le tout dans le langage des Liseiden, qui consistait en une série de rots liquides non dénués d'une certaine harmonie."
- La description hallucinée d'un ballon dirigeable rassemblant les futurs Sublimés dans une sorte de partouze géante et continue les cinq années précédant la Transition. Le capitaine de Zeppelin qui s'est fait installer trois cœurs supplémentaires pour pouvoir alimenter la trentaine de pénis auxiliaires greffés sur l'ensemble de son corps... Et bien... C'est quelque chose.
Banks ne se départit pas de ce ton décalé, cette musicalité qui fait dire que son space tient parfois autant du cake que de l'opéra. La causticité rigolarde de la plume ne masque pas totalement la profondeur de Banks qui ne manque jamais de s'interroger sur le Sens de tout ça, sur les limites et les dangers d'une toute puissance technologique:
"Une fois qu'on était capable de modéliser de façon fiable des populations entières dans un environnement simulé, au niveau de détail et de complexité signifiant que les individus au sein de cette simulation avaient une sorte d'existence autonome, la question devenait : jusqu'à quel point voulait on jouer à être un dieu, jusqu'où était on prêt à aller dans la cruauté ?"
LA SONATE HYDROGÈNE est clairement le plus "baston" des romans Culturiens, ça fighte méchamment.
"Mais espèce de folle, je suis un foutu putain de vaisseau armé jusqu'aux dents ! Je ne suis ni mâle, ni femelle, ni je ne sais quoi encore. Je suis fabuleusement intelligent, et là, juste maintenant, je suis réglé pour cogner."
La plume de Iain fait encore une fois merveille pour donner vie à ces combats épiques, même si, je l'avoue, ce n'est pas ce que je préfère.
In fine, on ne peut que constater que Banks évacue quelque peu son dénouement et que le grand secret ressemble à un têtard rouillé. Mais peu importe, le voyage compte bien plus que la destination, la route empruntée que le point de vue final.
Tout l'inverse de la Sublimation quand on y songe.
Iain qui a eu le mauvais goût de se sublimer.
Je ne sais pas où il est. Si même il est quelque part. Si il y est... Je suis certain qu'il ricane encore.
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